(Félicité Josèphe) Marceline Desbordes-Valmore (1786-1859)Femme de lettres et actrice française, qui fut la première grande poétesse romantique et qui introduisit en France l'usage du vers impair.
La vie de Félicité Josèphe Marceline Desbordes est marquée par le sceau du malheur. Née à Douai, elle dut interrompre ses études à cause de la ruine de sa famille. Sa mère décida de rejoindre un riche parent en Guadeloupe, mais mourut de fièvre jaune à l'arrivée à Basse-Terre ; Marceline rentra alors à Douai pour y débuter une carrière de comédienne et de cantatrice. Sa rencontre avec le compositeur belge Grétry lui permit de se produire à l'Opéra-Comique en 1805, puis au théâtre de l'Odéon en 1813.
En jouant à Bruxelles la Rosine du Barbier de Séville de Rossini, elle rencontra l'acteur Lanchantin, dit Valmore, qu'elle épousa en 1817. Le couple entama une vie difficile et errante. Marceline perdit peu à peu tous ses proches, ses enfants, son frère, et s'éteignit dans le désespoir à Paris en 1859.
Marceline Desbordes-Valmore abandonna le chant en 1823 et publia en 1825 son premier recueil poétique important, Élégies et poésies nouvelles. Sa renommée de poétesse grandit au fil de ses recueils ultérieurs : Poésies (1830), Pleurs (1833), Pauvres Fleurs (1839), et Bouquets et prières (1843). Un ultime recueil de Poésies inédites fut publié à titre posthume en 1860.
Complimentée par les plus grands poètes de son époque, tels Lamartine, Vigny, Hugo puis Baudelaire, Marceline Desbordes-Valmore est un auteur mélancolique dont les vers, d'une grande musicalité, méritent mieux que leur réputation de romantisme grandiloquent et suranné. Sa poésie, qui traduit le désir et les désarrois d'une femme à la recherche de son identité, est profondément originale et étonnamment moderne tant dans le style que dans le rythme ; elle fut en effet la première, avant Verlaine, à user de vers à onze syllabes. Marceline Desbordes-Valmore est également l'auteur d'un roman autobiographique, l'Atelier d'un peintre (1833).
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Viens ! Le jour va s'éteindre... il s'efface, et je pleure.
N'as-tu pas entendu ma voix ? écoute l'heure ;
c'est ma voix qui te nomme et t'accuse tout bas ;
c'est l'amour qui t'appelle, et tu ne l'entends pas !
Mon courage se meurt. Toute à ta chère idée,
d'elle, de toi toujours tendrement obsédée,
pour ton ombre j'ai pris l'ombre d'un voyageur,
et c'était un vieillard riant de ma rougeur.
Eh quoi ! Le jour s'éteint ? N'est-ce pas un nuage,
un vain semblant du soir, un fugitif orage ?
Que je voudrais le croire ! Hélas ! Un si beau jour
ne devrait pas mourir sans consoler l'amour.
Viens ! Ce voile jaloux ne doit pas te surprendre.
Dans les cieux à son gré laisse-le se répandre ;
ne va pas comme moi le prendre pour la nuit,
quand son obscurité m'importune et me nuit.
Si le soleil plus pur allait paraître encore !
Si j'allais avec lui revoir ce que j'adore !
Si je pouvais du moins, en lui livrant ces fleurs,
me cacher dans son sein, et rougir de mes pleurs !
Il me dirait : " je viens, j'accours, ma bien-aimée !
" ce nuage qui fuit t'aurait-il alarmée ?
" la nuit est loin, regarde ! " et je verrais ses yeux
rendre la vie aux miens, et la lumière aux cieux.
Non ! Le jour est fini. Ce calme inaltérable,
l'oiseau silencieux fatigué de bonheur,
le chant vague et lointain du jeune moissonneur,
tout m' invite au repos... tout m'insulte et m'accable.
Mais adieu tout ! Adieu, toi qui ne m'entends pas,
toi qui m'as retenu la moitié de mon être,
qui n'as pu m'oublier, qui vas venir peut-être !
Tu trouveras au moins la trace de mes pas,
si tu viens ! Adieu, bois où l' ombre est si brûlante ! ...
nuit plus brûlante encor, nuit sans pavots pour moi,
tu règnes donc enfin ! Oui, c'est toi, c'est bien toi !
Quand me rendras-tu l'aube ? Oh ! Que la nuit est lente !
Hélas ! Si du soleil tu balances le cours,
tu vas donc ressembler au plus long de mes jours !
L'alouette est rentrée aux sillons ; la cigale
à peine dans les airs jette sa note égale ;
un souffle éveillerait les échos du vallon,
et les échos muets ne diront pas mon nom.
Et vous, dont la fatigue a suspendu la course,
vieillard ! Ne riez plus, si mes tristes accents...
non ! Déjà le sommeil appesantit ses sens ;
il rêve sa jeunesse au doux bruit de la source.
Oh ! Que je porte envie à ses songes confus !
Que je le trouve heureux ! Il dort, il n'attend plus.Marceline Desbordes-Valmore, Oeuvres poétiques, tome 1, 1819-1833, Idylles, Élégies (1886), pages 14-15
Références :
- La Société des études Marceline Desbordes-Valmore (SEMDV) : https://www.societedesetudesmarcelinedesbordesvalmore.fr/
- Poética - Marceline Desbordes-Valmore : https://www.poetica.fr/categories/marceline-desbordes-valmore/
- Poésie française - Marceline Desbordes-Valmore : https://www.poesie-francaise.fr/poemes-marceline-desbordes-valmore/
- Les grands classiques - Marceline Desbordes-Valmore : https://poesie.webnet.fr/lesgrandsclassiques/Poemes/marceline_desbordes_valmore
- Un jour, un poème - Marceline Desbordes-Valmore : http://www.unjourunpoeme.fr/auteurs/desbordes-valmore-marceline
- Poésie française et mondiale - Marceline Desbordes-Valmore : https://www.poemes.co/marceline-desbordes-valmore.html
- Poeticous - Marceline Desbordes-Valmore : https://www.poeticous.com/marceline-desbordes-valmore?locale=fr
- Toute la poésie - Marceline Desbordes-Valmore : http://www.toutelapoesie.com/poetes/marceline_desborde_valmore.htm
Oeuvres poétiques :
- Élégies, Marie et Romances (1819)
- Poésies (1820)
- Les Veillées des Antilles (poésies et nouvelles, 1821)
- Poésies (1822)
- Élégies et Poésies nouvelles (1825)
- Poésies (1830)
- Album du Jeune Age (1830)
- Les Pleurs (1833)
- Pauvres Fleurs (1839)
- Contes en vers pour les Enfants (1840)
- Bouquets et Prières (1843)
- Jeunes Têtes et Jeunes Coeurs (1855)
- Poésies inédites (1860)
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